Les jeux sont faits, rien ne va plus ! Maintenant que la Russie a démontré sa capacité à assécher les voies d’approvisionnement, l’OTAN a choisi d’anticiper les éventuels sabotages d’internet par la sauvegarde satellitaire.
HEIST (Hybrid space-submarine architecture ensuring infosec of telecommunications) est un projet d’envergure dont l’ambition et les chiffres font tourner les têtes.
La sauvegarde d’Internet sans câble : Une nécessité impérieuse
Le saviez-vous ? Les réseaux sous-marins de fibre optique supportent 95% du trafic internet mondial. Simultanément, ils servent quotidiennement de passerelle à plus de 10 000 milliards de dollars de transactions financières.
Cependant, les câbles sous-marins peuvent subir des pannes ou être sabotés. Il s’agit d’un vaste réseau immergé de 500 à 600 câbles courant sur environ 1,2 millions de kilomètres. Étrangement, malgré leur utilité critique, ils sont majoritairement non protégés.
Des accidents surviennent. L’on dénombre actuellement 100 coupures de câbles chaque année.
Les sabotages sont également à redouter. Par exemple, les coupures dans la mer Baltique, imputées au sabotage russe ont laissé des séquelles.
En particulier, le cas de la frappe du Rubymar par des militants houthis dans la mer rouge en février 2024 a révélé la fragilité de ces câbles. Aussi fins qu’un tuyau d’arrosage, s’appuyer uniquement sur leurs services n’est désormais plus une option.
Au vu de ces chiffres alarmants et des velléités potentiellement hostiles de la Chine et de la Russie, l’OTAN a propulsé l’initiative HEIST.
HEIST : Un projet ambitieux
HEIST a deux missions. En premier lieu, la détection rapide des éventuelles pannes quelle qu’en soit l’origine. En second lieu, la redirection des données d’Internet par voie satellitaire.
Il constitue une solution de rechange face à la vulnérabilité des câbles sous-marins, et doit fournir des mesures de protection du parc existant.
HEIST dispose d’un budget de 2,5 millions de dollars, dont 400 000 dollars de la caisse de l’OTAN.
Des chercheurs de plusieurs nationalités participent au projet, ainsi que les sociétés SpaceX, Sierra Space, l’islandaise Syndis et Viasat.
Les premiers essais sont attendus à partir de janvier 2025 à l’Institut technologique de Blekinge (BTH) à Karlskrona (Suède).
Au programme, localiser précisément les zones de rupture des câbles et créer des protocoles de transfert des données vers les satellites.
En pratique, les câbles seront équipés de capteurs pour détecter les problèmes de transmission en temps réel, déclenchant la redirection satellitaire. D’ici décembre 2026, le produit fini doit être opérationnel.
A l’issue du projet pilote, l’OTAN espère que l’Occident sera moins dépendant des câbles sous-marins.
Internet dans l’espace : quelle viabilité ?
Première difficulté au projet : les satellites ont une capacité inférieure à celle de la fibre optique.
Deuxième difficulté : la fiabilité des satellites dépend des conditions météorologiques (la fumée, la brume et les nuages).
Troisième difficulté : Le délai de transmission satellitaire est plus long.
Le début de solution : La nouvelle technologie par laser en test peut élargir jusqu’à 40 fois la bande passante des satellites.
Clairement, il reste encore des efforts à fournir.
Finalement, le projet HEIST vise la résilience de l’Internet, via la diversification des voies de transfert des données.
Et s’il faut redéfinir l’architecture de la sécurité numérique pour déployer ce système de secours orbital, l’humanité a sûrement toutes les ressources pour y parvenir.
Protéger et diversifier l’infrastructure mondiale d’Internet : c’est un bon deal.
Une fois ce défi relevé, se posera à coup sûr la question de la démocratisation des technologies déployées.